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15 Août 1959 jmo

1959 Hervé Butel au col de Moundelhs en 1959. Comment tout a commencé

1015 Ossau - Pyrenees

Derrière lui le petit pin désormais nommé Hervé

Comment tout a démarré à la fin de l’été 1958

Ces menus évènements ont conditionné mes années à venir et
peut-être même ma vie tout court.

Introduction
Depuis 1957, au collège de l’Immaculée Conception, à l’issue
de longs conciliabules avec mon camarade Henri Abadie échangés
dans la cour de récréation des Grands et ses vénérables platanes
(sans doute les derniers témoins de l’ancien parc dans lequel avait
été édifiée l’ancienne institution des Jésuites dissoute à la Révolution),
m’était resté en mémoire la virée spéléologique à laquelle il avait
participé avec le groupe de scouts auquel il appartenait et qu’il
m’avait racontée en détail, avec beaucoup d’enthousiasme. Son récit
m’avait fasciné, par la description qu’il m’avait faite des deux
cavernes mystérieuses qu’il avait visitées, assez proches l’une de
l’autre, dans le même vallon. L’une d’elle était d’accès facile et
comportait un grand porche sous lequel il était facile d’imaginer que
nos ancêres préhistoriques s’abritaient. Malgré tous leurs efforts
ils ne lui avaient pas trouvé de prolongements souterrains.
Ils avaient accédé à l’autre caverne par une ouverture discrète et
avaient découvert une grande salle ornée d’une superbe formation
stalagmitique. Contrairement à la première caverne une ouverture
permettait de poursuivre l’exploration. Elle donnait accès à un
étroit couloir qui aboutissait au plafond d’une seconde salle. Afin
de l’explorer les scouts avaient amené des échelles souples de type
spéléo afin de descendre sur le plancher en pente de la salle inférieure.
L’exploration s’était arrêtée là car aucun orifice disponible ne permettait
de la prolonger. C’était du moins leurs conclusions.
Cavernes, hommes préhistoriques, stalagtites, stalagmites, salles, boyaux,
exploration, découvertes de zones inconnues, quel programme ! Et combien
il aurait pu égayer mon esprit durant cette lugubre année scolaire 1958 au
Lycée Louis Barthou de Pau dans lequel rien ne me plaisait. Je n’y ai
vraiment repensé qu’aux vaca
nces suivantes, lorsque je fus repris par le démon de la bougeote comme
j’avais pu l’être durant l’année-vélo 1956 et le voyage vers la mer avec
mon ami Gérard. Mais comment retrouver ces cavernes mystérieuses qui
avaient tant plu à l’ami Henri et qui m’avaient tant fait rêver ? Il me
fallait retrouver Henri afin qu’il me fournisse plus de précisions.
Je cours donc à son domicile, mais y trouve porte close. La famille est
sans doute en vacances. L’époque n’étant pas encore au téléphone,
encore moins aux textos, je m’arme de ma plus belle plume et lui adresse
un courrier en pensant que ma lettre finira bien par l’atteindre. Mais quand ?

L’été s’avance, j’oublie Henri, j’oublie les cavernes. Elles sont déjà
remisées dans le repli mythologique de ma mémoire des choses décidément
inaccessibles voire infaisables à l’instar de la soucoupe volante mue
par un sytème anti-gravitationnel que, dans ma jeunesse, je construisais
tous les soirs avant de m’endormir – moment où je m’envolais enfin
vers les étoiles (que je pouvais voir de la fenêtre !).
C’est durant la première semaine de Septembre que je reçois un pli envoyé
par Henri, depuis Les Troënes à Hossegor dans les Landes. Son lieu de
vacances manifestement. Il répond à ma requête pressante avec moult détails
mais sans la précision nécessaire pour localiser les grottes car, écrit-il,
« les grottes que j’ai faites sont difficiles à localiser. » De petits
croquis, sensés m’éclairer, accompagnent le texte. Le dernier laisse
augurer d’une poursuite possible de la seconde caverne par un couloir
signalé « inconnu », ce qui est très excitant…
Voici la lettre de Henri :

Jeudi 4 Septembre 1958 – Lettre de Henri Abadie

La lettre d’Henri, adressé à Jean Ollivier, 7, Avenue de Lons à
Pau (B.P.), donc à El Patio, la Petite Maison étant au n°5. [Début
septembre nous avions donc déjà déménagé].

Hossegor le 4 sept. 58
Cher ami
J’ai reçu ta lettre et je m’empresse avec un jour de retard d’y
répondre. Comme tu le sais je suis à Hossegor, endroit particulièrement
agréable pour passer des vacances. Je navigue continuellement sur mon
bateau, à voiles quand il y a du vent, à rames dans les autres cas.
J’ai appris avec plaisir que tu avais passé un mois de vacances
formidable, il paraît que la Medit…(c’est trop long) est très agréable.
Je n’y suis jamais allé, ni aux Calanques.
Venons au sujet qui nous intéresse :
1°/ Les échelles de corde… en acier, c’est Thin’s
[l’abbé Sorre, le prof de chimie en 3ème, identifié par les sons de
la verrerie chimique qui s’entrechoque avec ce son caractéristique]
qui était allé les chercher chez Bidegain. Je ne doute pas que ce
dernier te les prête, il est très sympa, sinon va voir Thin’s et
demande-lui où on pourrait en trouver – peut-être chez les scouts
de St Jacques ou sûrement chez ceux de Pontacq. C’est du travail
pour en trouver.
2°/ Pense aux casques (très très utiles. Pour toi
tu en as un, que les autres en aient aussi ; montes-y un phare de
vélo c’est très commode.
3°/ Question vestimentaire c’est très facile ; il
est cependant conseillé d’avoir une combinaison de mécano et d’y être
en maillot de bain car en sortant vous serez tout jaunes de terre
glaise [argile]. Si vous avez des échelles, prenez des baskets
comme chaussures car les crampons de celles de montagne accrochent.
Les grottes que j’ai faites à Arudy sont difficiles à localiser.
Je vais essayer de te faire un plan (sic).
Suit un plan succinct avec deux lieux annotés 1 et 2.
1/ Grotte d’Espalungue (je ne l’ai pas faite, tout le monde
la connaît).
2/ C’est par là (c’est vague). Il faut descendre dans un champ,
contourner une grange et pénétrer dans le bois ; il y a d’ailleurs un sentier.
Il ya 2 grottes ;
- une qui nécessite une échelle pour descendre dans une
grande salle mais qui est facile sauf l’entrée de la salle qui
est dans un coin et étroite.
- Puis il y en a une autre, 100 mètres plus loin qui tout
d’abord paraît impossible, mais au plafond il y a un étroit goulet.
Il faut faire de l’escalade artificielle pour aller y mettre une
échelle, de là tu marches cinq mètres à plat ventre ( !) et tu
débouches sur une plate-forme. Il faut mettre une autre échelle
juste à la sortie du goulet car c’est instable et il y a chute de
pierres. Le boyau suivant est en bas, il faut y aller à quatre pattes
et c’est long, plus loin l’inconnu ( ?).
- Suit le schéma en coupe de la caverne avec la montée et la
descente au moyen d’échelles et le départ vers l’inconnu.
Je te quitte en te souhaitant une belle balade et le beau temps
(se méfier des infiltrations).
A bientôt
Henri

Dimanche 6 Septembre 1958date approximative – En vélo avec Pierre,
découverte du cirque d’Anglas.
Equipe : Pierre-Jean
Véhicules : vélos
Nous avions l’habitude, Pierre et moi de faire de petits tours
en vélo dans la région, jamais très loin de la maison : Morlaas,
Lacq, Nay… Mais cette fois, intrigué et rendu très curieux à la
lecture de la lettre de Henri il me tarde de suivre les indications
de mon copain afin de repérer les fameuses grottes. Pierre est
d’accord pour m’accompagner sur son petit vélo. Pierre est âgé de 12 ans.
Je n’ai pas pris de notes à l’issue de cette expédition. Seules
m’en restent quelques images. Les 50 km AR en vélo n’ont pas posé
de problèmes. Nous étions entraînés. Mais arrivés à Arudy, bourg
vaguement entrevu dans les années 1955-1956, lors de déplacements
au Rocher du Bouvier avec mon père, nous eûmes les plus grandes
difficultés à faire correspondre les indications de l’ami Henri avec
la topographie des lieux. Il ne nous avait même pas indiqué le nom
des fameuses grottes. Peut-être l’ignorait-il lui même. En écrivant
ce texte j’imagine un instant que nous sommes en 2020 et perclus de
perplexité sur la place d’Arudy : « Allo Henri ? Nous sommes arrivés
à Arudy et, malgré tes précieuses indications, nous ne savons pas
trop vers où nous diriger pour retrouver tes grottes. Peux-tu nous aider ? ».
On peut toujours rêver aux bienfaits de la technologie. Mais voilà
déjà un an et demi que Henri est venu par ici, intégré dans un groupe
qui connaissait l’itinéraire à emprunter. On peut considérer que les
efforts d’Henri pour me « tuyauter » par écrit sont assez remarquables.
Que peut-il ajouter ? Bon, rangeons le téléphone fictif, réintégrons
notre capsule spatio-temporelle et regardons ce que nous pouvons
faire en ce mois de septembre 1958. J’ai en main le topo d’Henri, une
boussole et une carte d’Etat-Major en noir et blanc du XIXème siècle.
Ah, j’oubliais, en 2020 nous aurions bénéficié de cartes en couleur
à petite échelle et ultra-détaillées, ainsi que d’un GPS ultra-précis.
Quelle joie ! Il n’y aurait plus rien à chercher, tout serait servi
sur un plateau. Heureux ?
Nous patrouillons, Pierre et moi, de notre mieux. Ici les gens ne
connaissent que la grotte d’Espalungue et selon eux il n’y en a pas
d’autres. Henri indique une route qui part vers Oloron. En fait il y
en a deux. Quelle est la bonne ? D’après le schéma succinct « c’est
par là », c’est à dire une route qui va à Oloron en passant par le
bois du Bager, et au bout de x km « descendre à gauche dans un champ
et contourner une grange…[plus loin] il y a d’ailleurs un sentier.
» Des champs, des granges, il y en a partout. Nos recherches restent
vaines. La route du bois du Bager devient vite compliquée. Nous
rebroussons chemin pour nous consacrer à l’exploration de la zone
située à l’Ouest du village, au-delà d’une marbrerie et de l’énorme
menuiserie Lombardi et Morello. Nous faisons ainsi connaissance avec
la Fonderie Messier et le paysage sauvage qui l’entoure. Il ne correspond
en rien aux indications d’Henri. Nous continuons donc à fureter
jusqu’à une ferme ultime [ferme Courrèges-Anglas], en direction de
rochers aperçus de loin. Pour nous les cavernes se trouvent au pied
des falaises, c’est bien connu. Rochers, donc cavernes. En nous
approchant nous devinons bien un vallon, mais pas le champ signalé,
avec sa fameuse grange qu’il faut contourner. En poursuivant nos
recherches nous finissons par tomber sur un champ comportant une
grange en effet. Mais si nous passons par là nous nous éloignons
des rochers, donc des possibles cavernes, et au-delà il n’y a
ni bois ni sentier accueillant.
Nous faisons marche arrière et tentons de parvenir directement
au pied des falaises, parfaitement visibles depuis une ancienne
carrière située non loin de la ferme Courrèges-Anglas. Abandonnant
les vélos nous pénétrons dans une sorte de jungle composée de buis
serrés entre eux et de ronces entremêlées, le tout sur un épais tapis
de mousse humide qui recouvre un pierrier instable. Tout pour plaire.
A ce régime les rochers semblent s’éloigner au point de devenir
inaccessibles. Ecorchés, griffés de partout nous abandonnons assez
vite cette exploration aléatoire qui ne conduit nulle part. Car,
convenons-en, la troupe de scouts et Henri ne sont pas passés par là, c’est évident.
Désappointés nous reprenons nos vélos pour rejoindre Pau et la famille
à une heure correcte. Le mystère des grottes de l’ami Henri reste
entier. J’ai simplement appris à connaître les endroits qu’il n’est
plus nécessaire d’explorer.
Ayant « photographié » les lieux après cette reconnaissance
topographique de la région d’Arudy, je cherche à obtenir des
détails supplémentaires de la part du copain Henri et je
m’empresse de lui adresser (peut-être) une nouvelle missive
avide de précisions, à la limite de la naïveté. J’ai retrouvé
le brouillon. La lettre est-elle partie ? J’en doute un peu car
je n’ai pas obtenu de réponse, semble-t-il.

7 ou 8 Septembre 1958 – Contenu de la missive adressée à Henri
Abadie après l’expé bredouille avec Pierre. Je me demande
encore aujourd’hui ce qui primait en importance, le bac ou
les grottes de Henri ?
Mes requêtes sont précises. J’ai retrouvé le brouillon sur
lequel figurent les détails que j’attends de Henri pour trouver ses grottes.
1/- Pour arriver aux grottes, le chemin est-il large,
étroit, empierré, de terre, entouré de haies ou non ?
2/- Le chemin est-il sinueux, en croise-t-il d’autres ?
Faut-il passer par-dessus des barrières ?
3/- Marche-t-on longtemps pour arriver au bois ? Marche-t-on
longtemps dans le bois ?
4/- L’entrée des grottes est-elle apparente ? S’écarte-t-elle
du sentier ? A droite ou à gauche ?
Faut-il contourner la grange par la droite ou par la gauche.
Pour les grottes quelle longueur de corde faut-il ?
Est-ce désert autour de l’entrée des grottes ?
…………
Il serait peut-être moins fatigant que tu viennes
avec moi, si c’est dans tes possibilités ; je vais te donner les miennes :
- Le 17 et 18 niet !!!!
- jusqu’au 25, date des résultats, je peux trouver 1 jour
- Si j’échoue, j’ai du 25 au 30 ; sinon je n’ai plus que le
30, l’oral étant le 29.
De toute façon je me trouverai facilement 1 jour. A toi
d’aviser… et d’aviser comme il faut !

Amitiés et à bientôt
Jean

PS : J’ai 50 mètres de corde, pas de montagne, mais solide. 10 pitons,
5 mousquetons à moi + le reste.
Deux casques avec lampe à vélo. Il manque 1 pile. 1 salopette et une
combinaison en nylon, 1 marteau d’escalade, des bougies, lampe à acétylène etc…

17 et 18 Septembre 1958 – Session écrite de Septembre du bac

24 Septembre 1958 – Lettre de Hervé, suite à la rencontre avec Mam.
Sur ces entrefaites, au mois de septembre 1958, ma mère croise en ville,
à Pau, mon ancien camarade de classe Hervé Butel, prend de ses nouvelles
et l’informe de ma disponibilité.
Malgré la proximité de nos domiciles, Hervé se fendit d’une lettre
tout ce qu’il y a d’officiel, lettre que par miracle je possède encore
en 2020 et pour longtemps :

« Mon vieux,
C’est clair, je m’ennuie, tu t’ennuies (paraît-il) ;
il serait peut-être alors possible de se revoir. Tu
connais mon adresse »
hervé butel

Nous n’avons pas perdu de temps. J’avais un projet en cours et
le désir impérieux de le réaliser. Hervé arrivait à point nommé.
Mis au courant il adhéra tout de suite au projet, et rendez-vous
fut pris pour mettre la main, les pieds et le reste sur ces
foutues cavernes nichées dans un recoin caché de la région d’Arudy.
A partir de dorénavant elles n’auront qu’à bien se tenir.

29 Septembre 1958 – Oral du bac à Bordeaux
Voyage en voiture avec mon père. Stress intense. Nous passons
à proximité d’une base militaire américaine, puis allons déjeuner
chez Jacques Soubis, GPHM et dentiste en proche banlieue de Bordeaux.
Appétit nul. Mme Soubis m’encourage. Elle m’enverra un mot lorsqu’elle
apprendra mon succès au bac.

Lundi 6 Octobre 1958 – Premier jour de classe pour la nouvelle année
au Lycée Louis Barthou à Pau.

Bac en poche et à nouveau inscrit au lycée Louis Barthou, classe de
Maths Elem, je m’empresse de recontacter Hervé pour mettre au point
notre expédition aux grottes de Henri Abadie N’y a pas que les maths dans la vie !
Equipés du mieux que nous pouvons l’être nous décidons de nous
retrouver dimanche prochain pour tenter de résoudre ensemble l’énigme
des grottes de l’ami Henri, dont nous apprendrons plus tard qu’elles se
nomment Malarode, sans doute du nom de leur découvreur.


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