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22 Nov 1938

Robert et Maïté 1938 en tenue de mariés. Ils ont l'air heureux, ça ne va pas durer.

Photo prise à St Savin, lieu du mariage religieux

L'enfer de la vie de Mam dans la Petite Maison

Avec la Petite Maison en cadeau de mariage offert par la mère de Robert tout semblait bien parti. Mais voilà, le fils à sa maman ramena sa jeune epouse à l'etat d'esclave domestique. Les exemples ne manquent pas.
Ainsi Mam, outre les innombrables contraintes domestiques doit se rendre dans la ville voisine plusieurs fois par semaine faire toutes les courses pour la famille avec un budget très serré. Le maître ne lui alloue que ce qu’il estime être nécessaire. Mais qu’en sait-il ? Il n’a jamais fait de courses de sa vie et s’en garderait bien. Pas assez noble pour lui... Le maître sait. Il sait que lorsque Maïté s’est mariée avec lui elle était si pauvre que son trousseau se ramenait à très peu de choses. Quelques maigres oripaux, quelques souvenirs personnels. Tandis que lui, fi-fils à sa maman, il amenait dans sa corbeille une belle villa toute neuve et meublée, plantée dans un grand terrain, un champ comme nous disions, une belle voiture dernier cri et une garde-robe de nabab. Chez les Froment [famille d’origine de sa mère] n’avaient de valeur et d’intérêt que ceux qui pouvaient se revendiquer d’une fortune personnelle. Malgré ses déboires familiaux avec le père de son fils, modeste et sans fortune, sa mère continuait à transmettre ce critère rédhibitoire : pas riche donc pas bon. Et vlan sur la belle-fille de modeste extraction, la voilà estampillée pauvre donc pas bonne. Imprégné de cette culture discriminatoire le fi-fils à sa maman fit sien ce critère et considéra la mère de ses enfants comme une simple bonne à tout faire (une « bonniche ») durant tout le temps où dura leur union officielle (1938-1967). Son "Cahier Vert", rédigé en 1967, est sans ambigüité sur cette question. Et de là à la charger de tous les défauts il n’y a qu’un pas qu’il a franchi allègrement. Non que Mam soit exempte de défauts, mais c’est vraiment vicieux de lui trouver des défauts imaginaires ou de tordre la réalité et de transformer ses qualités en défauts.
Il estimait donc avoir tous les droits sur notre mère, car, pauvre, elle ne valait donc rien et son seul projet était, selon lui, de lui bouffer la laine sur le dos, en d’autres termes le ruiner.
Et le voilà, tous les matins, satisfait et fier de lui, qui fait chauffer consciencieusement la berline qu’il utilise pour le transporter sur son lieu de travail, à quelques kilomètres seulement. Et Maïté et ses courses ?
Qu’elle se démerde grommelait-il dans sa barbe, sans l’affirmer vraiment. Je distribue le fric et puis quoi encore ? Il ne veut rien voir ni savoir. Mais à midi et ce soir vers 20 heures il sera là, et critiquera éventuellement le menu, les dépenses, selon son humeur qu’il faudra supporter.
Mam n’avait pas de voiture à sa disposition, or c’est elle qui devait transporter un maximum de choses. On peut considérer qu’en 25 ans elle a véhiculé de la ville au domicile plus de 80 tonnes de victuailles et autres nécessités. Valeur basse selon moi. Elle ne possédait pour cela qu’une modeste bicyclette, achetée avec ses sous, dont le dérailleur avait disparu depuis longtemps, mais construite en tubes Reynolds disait-elle fièrement. Je ne vois pas de sacoches sur cette bicyclette, Mam accrochait ses paniers au guidon, pas fameux pour l’équilibre de l’équipage. Sans compter les risques liés à la circulation. Elle fut projetée deux fois à terre, une fois par un bus, une autre fois par la voiture d’un conducteur pressé. Le centre ville et le marché étaient assez éloignés de la maison et les transports en commun étaient très rudimentaires. De l’Avenue de Lons il n’y avait qu’une seule ligne de bus qui desservait la place Clémenceau, elle-même à l’écart du marché. Mam y achetait l’essentiel des provisions de bouche pour la famille, lesquelles étaient à renouveler fréquemment car il n’y avait pas de réfrigérateur dans la Petite Maison, rien que de simples garde-mangers à température ambiante. On peut dire que durant son séjour dans la Petite Maison de 1938 à 1958 puis à El Patio de 1959 à 1967, Mam fit plusieurs milliers d’aller-retours en ville avec son petit vélo, toujours le même. Chagriné par cet état de chose et ayant déniché une 4 CV d’occasion j’avais tenté d’initier Mam à la conduite automobile. En vain, après des décennies sur son petit vélo elle ne savait plus conduire autre chose.
Jamais de mémoire d’enfant ce père de famille imbu de sa personne et sa petite voiture à lui n’offrit ses services pour soulager Mam de ce pensum insupportable. Cela ne l’empêchait pas de critiquer ses achats sans jamais se renseigner sur leur prix, ni sur la façon dont elle était obligée de faire ses fameuses courses.
Or, au marché, Mam discutait âprement les prix pour faire des économies, toujours des économies, une obscession. Dans mes jeunes années il m’est arrivé de l’accompagner et j’ai pu voir avec quel brio elle savait faire baisser un prix. De cela le père Ollivier était bien incapable. Mam était constamment à l’affut des soldes, pour les vêtements et le linge de maison par exemple. Le magasin Dinand, proche du marché reçut souvent sa visite. Elle « faisait des affaires » indubitablement, mais parfois un peu trop, par excès de zèle économique partant d’une bonne intention. Résultats : prochain repas familial gâché par des hurlements à connotations économiques, les enfants étant pris à témoin. A témoin de quoi ? Nous n’y comprenions goutte et ce d’autant qu’immanquablement la conversation dérivait avec violence sur des allusions à des faits que nous ignorions, telles les incartades permanentes du père avec son "éternelle maitresse" qui avait depuis longtemps remplacé l'épouse légitime mère de ses enfants.
Cette histoire a commencé par une dispute entre les parents et l’on voit qu’il en est toujours question. Ce fut une constante de notre vie familiale. Les parents ont tous les deux pourri la vie de leurs enfants, leur jeunesse. Les pauvres mômes abordaient les moments du repas, qui auraient dû se passer sous le signe de la convivialite et du partage, du plaisir de manger sensembe, avec anxiété, voire plus. Nous redoutions par-dessus tout la phrase ou le mot qui déclancherait les hostilités. Ce qui subvenait à presque tous les repas. Il nous est arrivé de nous enfuir de la table familiale, désespérés, pour nous réfugier dans un coin de la maison, loin du vacarme, des injures, des noms d’oiseau balancés sans vergogne et sans pudeur en notre présence muette. Attitude irresponsable d’adultes immatures . Nous voulions fuir cet enfer, et pendant que les assiettes volaient bas dans la salle à manger, nous rêvions de fuite, d’une autre famille, imaginions une stratégie pour nous faire adopter ailleurs, nous rêvions de leur échapper à tout jamais. Nous commencions à les détester, n’arrivant pas à faire la part des choses entre les torts de l’un ou de l’autre.
Je n’ai toujours pas compris un tel laisser-aller obscène, cet exhibitionnisme de leurs pires travers, cette caricature d’humanité, cette violence incontrôlée.
VOIR AUSSI la partie finale du "Grand Voyage 1955" dans laquelle la vie de Mam est décrite en détail.


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