Photo : dispositif de bivouac à Ansabère et testé auparavant sur un prunier du jardin
Page 128 du Carnet III
Lundi 13 Septembre 1965 – Bivouac dans le hamac-siège à El Patio.
Chantal-Jean à Sesto en 500cc RGST.
J’ai pour projet de retourner bientôt à Ansabère pour laver
l’horrible déconvenue du précédent échec et attaquer sérieusement
le grand dièdre entrevu. Cette fois ce sera sans petits copains
chahuteurs et noctambules, sans surtout la jolie minette dévastatrice
d’Hervé (Renée), et avec l’équipement et les vivres nécessaires.
Un petit entraînement d’entretien est effectué à Sesto. Chantal
et moi grimpons la voie des Soupirs, puis l’Aklon qui me révèle
déjà un manque d’entraînement.
La mise au point du matériel tant d’escalade que de bivouac, surtout
de bivouac, fait pour moi l’objet de toutes mes attentions ! Nous
en avons trop bavé lors de notre dernier bivouac sur étriers.
Je me lance pour cela dans la haute couture sur toile de sandale
en puisant dans les anciens stocks de toile en rouleau et de fils de
couture qui datent de l’époque de la petite entreprise paternelle de
confection de sandales (~1950), associé au dénommé Simacourbe, grand
expert es savates s’il en est. La petite entreprise sise dans le garage
de la petite maison et dans celui d’El Patio, animée par des ouvriers
espagnols ayant fui la guerre d’Espagne, a fait rapidement la culbute,
concurrencée par une multitudes de petites boîtes qui croyaient elles
aussi en la sandale, puis les chaussures… en vain.
Je confectionne une sorte de large ceinture pouvant être convertie en
siège pour Hervé, et carrément un siège pour moi, me basant sur le fait
qu’on arrive bien à dormir assis dans une voiture ou dans le train. Mais
ce n’est pas tout. Ce siège est-il suffisamment bien conçu pour que je
passe impunément une nuit assis dessus ? S’agit pas d’attendre d’être
en paroi et bien crevé pour que je me rende compte que je viens d’inventer
un nouvel instrument de torture. Il faut donc l’essayer en situation
réelle. Je le fixe sur le grand prunier d’El Patio qui est face à ma
chambre, laquelle sera facile à rejoindre au cours de la nuit si l’expérience
est par trop horrible. Dans ce cas il serait alors nécessaire que j’améliore
ma création haute couture afin que je passe une nuit de rêve à Ansabère.
A la nuit tombée j’investis donc le siège suspendu. Le plus difficile
est de m’y installer avec le sac de couchage sur moi, ou d’enfiler le
sac de couchage lorsque j’y suis assis. Une fois calé je m’endors du
sommeil du juste pour me réveiller au chant du coq. Excellente nuit !
Siège-bivouac agréé !