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12 Janvier 1964 JMO

4 et 11 au 13 janvier 1964 Sesto avec Bernard et couloir de la Fourche en solo

Bivouac route Pourtalet cause avalanche

Photo : Hervé et JP Leire dans le cirque sud de l'Ossau

Samedi 4 Janvier 1964
Cordée : Bernard Borneuf et Jean
Véhicule : Traction

Avec Bernard donc, en Traction. Il fait beau et bon mais
un méchant rhume me fatigue.
Nous grimpons la Vol-au-Vent. Puis le Dièdre des Palois, que
je dépitonne. Descente en libre du surplomb des ciseaux [voie
du Coiffeur ?] (à noter pour les débutants).
Après un bon goûter, au crépuscule, dépitonnage du Grand Capucin.

Liste de quelques voies pour débutants :
- Voie des Charbonniers III+
- A droite des ciseaux et sortie directe III, IV-
- Grande Arête Est III
- Petite Arête Est IV
- VN II
- Z III
-
Départ Herr Wick et à droite par traversée III
- Profil et Dalle III
- La Céphalode 1 III+

Page 413 du Carnet II

Samedi-Dimanche-Lundi 11, 12, 13 Janvier 1964 – Ossau, Fourche en solo
Equipe : Hervé-Jean-Leire
Véhicule : DS 19, 500cc RGST pour aller au Foufouland.

Les grandes épopées reprendraient-elles vie ? En tout cas celle-ci en
est une. Avec Hervé retrouvé j’ai échafaudé toutes sortes de projets
pour le long WE à venir. Gravir l’Ossau par le Cirque Sud ! C’est bien
plus beau que par la voie normale. Nous remuons chacun de notre côté
terre et ciel le vendredi 10 Janvier 1964 pour que quelqu’un puisse
nous transporter dans ce que nous considérons être notre paradis.
Parents, cousins, étiques ou pas, frères et sœurs et même beau-frère,
copains motorisés, tout ce monde est trop occupé en ce début d’année.
Mais parmi les copains motorisés il y en a un qui a levé le sourcil,
a réfléchi, puis est revenu vers nous en émettant une condition :
il peut nous transporter mais à condition de faire partie de notre
cordée, c’est à dire faire la course projetée avec nous. Il s’agit de
Jean-Pierre Leire, qui aime la montagne on ne sait trop pourquoi et
qui peut disposer de la DS 19 de ses parents, le principal pour nous.
Nous acceptons en nous disant qu’il restera peut-être au refuge.
N’y voir ni méchanceté ni cynisme, rien que du réalisme. Jean-Pierre
atteint assez vite ses limites en montagne malgré sa volonté et sa tenacité.
Et donc samedi après-midi 11 Janvier nous partons en DS avec
Jean-Pierre, lourdement équipés. Le temps est froid et magnifique,
les Gorges du Hourat au-dessus de Laruns dégoulinent de glace et de
stalagtites, même chose du côté du lac de Fabrèges. Le ton ambiance
hivernale est donné.
Très vite au-dessus de Fabrèges c’est la même chanson que lorsque
nous venions en moto, la route n’est pas entretenue et les plaques
de neige et de verglas deviennent de plus en plus importantes à
mesure que nous montons. Leire, qui aime jouer au pilote émérite,
arrive à passer plusieurs plaques mais finit par échouer sur un
obstacle nivo-glaciaire insurmontable.
Nous abandonnons donc la voiture et gagnons Aneu à ski, en 1 heure.
Et j’en ai déjà marre ! Il fait noir, le sac est trop lourd et tire
sur les épaules, les pieds font mal, et tout cela à monter ! Ah que
c’est pas marrant ces perspectives qui ne dépassent pas la pointe
des spatules ! Mais nous voilà partis, et condamnés à continuer
jusqu’au refuge. Sur les pentes raides précédant le col de Pombie
les traversées sur neige dure sont infernales et nous obligent
à déchausser. Il y a heureusement une trace. Plus haut, au voisinage
du col nous rechaussons. Et du col au refuge ça n’en finit pas,
nous qui pensions nous laisser glisser mollement vers ce havre de
paix ! Enfin le voilà, quelle flemme ! Il est 21h.
Fatigué, mal aux dents – vieux compagnon de toujours – mangeote,
bois un excellent Tonimalt qu’Hervé m’a préparé, heureusement
qu’il est là, j’avale un somnifère et m’endors comme une masse…
Le matin, las d’attendre la sonnerie du réveil-matin qui ne sonnera
jamais, nous nous levons, déjeunons et partons en même temps que le
jour se lève. Le jour ! Voilà des années que nous nous déplaçons
essentiellement durant la nuit. C’est mauvais pour le moral et je
commence à en avoir marre.
Je prends la tête à ski, et à mesure que le jour se lève, je m’anime
de plus en plus, l’humeur monte au beau et éclate lorsque le soleil
nous atteint. Le monde revit avec l’astre, l’Ossau redevient un ami.
Lorsque la pente se redresse nous quittons les skis et chaussons les
crampons et zn avant ! C’est là que je sème tout le monde. Plus la
pente est raide, plus je suis heureux. Et avec cet immense déversoir
sous les pieds que craint-on ? Ce n’est pas l’avis de Jean-Pierre qui
devient très circonspect face à la raideur de la pente et ralentit sa
marche, ce qui nous fait perdr
e du temps. Il commence à avoir peur car ce terrain et le cramponnage
lui sont étrangers. Il se demande s’il ne s’est pas engagé à la légère
à vouloir nous suivre. Hervé reste près de lui pour lui soutenir le moral.
Arrivé le premier au pied de la paroi rocheuse qui s’élance jusqu’au Rein
de Pombie, je les attends.
Mon regard se tourne alors vers le Sud auquel je tournais le dos en
cramponnant sur la pente devenue fort raide à proximité des parois.
J’aperçois alors une sinistre barre noire qui plombe le ciel au-dessus
de l’Espagne. Hum ! Déjà des filaments de nuées inquiétantes fouettent
le Grand Pic à toute vitesse.
Le temps de s’encorder et de commencer l’escalade et tout est bouché
par un brouillard glacial porté par un vent violent. Des aigrettes de
givre se fixent un peu partout, sur la corde, les cils, les sourcils,
les rochers, la moindre herbe. Le froid coupant paralyse nos maxillaires
et nous empêche de parler. Ce coup de Trafalgar brutal porte un rude coup
à notre moral de vainqueur. Figés sur place nous ne voyons pas d’autre
alternative que de renoncer à notre entreprise et battre en retraite.
Et la présence de Leire, vraie masse inerte il faut le dire, ne peut
que nous encourager dans ce choix. Il vaut mieux s’en aller, à notre
grande déception.
Il sera dit que nous ne gravirons jamais l’Ossau en hiver ! Présentement
nous n’avons grimpé que deux petites longueurs, Hervé en tête en Vibram,
Leire et moi en crampons. Tout va bien en ce début d’escalade. Le rocher
sent le soufre sous les gr
iffures des pointes d’acier des crampons des grimpeurs pressés d’arriver.
Un long rappel nous dépose sur le névé. Je descends seul pendant qu’Hervé
assure Jean-Pierre qui va pas à pas et fort lentement sur la pente dont
la raideur le tétanise. Il faut remercier le côté mère-poule d’Hervé. Ç’eût
était un autre copain moins compréhensif Leire serait encore accroché
lamentablement à sa pente comme un cloporte infirme sur une écorce glissante.
Les abandonnant à leur triste sort je descends rapidement sans utiliser
le piolet. Je fais entière confiance en mes crampons, confiance justifiée
je crois. Je poursuis ainsi jusqu’à l’Y de la Fourche et les attends.
Le mauvais temps a subitement cessé, aussi vite qu’il nous est tombé dessus ;
tout est calme maintenant. Nous pourrions reprendre notre ascension.
La peste soit de ce funeste intermède ! On dirait un fait exprès pour
nous faire louper la course. Au loin deux puces de glacier progressent
à une allure limacique. Je m’impatiente. Le confort de la DS est en train
de se payer. Grande loi de la nature, tout se paye.
C’est alors que mon regard se toune vers la Fourche. Je suis au pied du
couloir qui y mène et le chemin paraît très court, la pente insignifiante.
Je sais que c’est un effet de perspective. Nous l’avions bien constaté au
couloir de Gaube qui, lui-même, semble couché lorsqu’on l’aborde. Alors le
couloir de la Fourche… Il semble tellement anodin que je m’y avance un peu
pour mieux me rendre compte, et il semble de plus en plus plat à mesure que
je monte. Le haut du cirque Sud d’où nous venons est beaucoup plus raide.
La neige dure porte et cramponne bien, le temps sans être au beau fixe,
s’est assagi. Le soleil réapparaît par moment et la température est
remontée. Il fait bon.
Je suis déjà bien engagé dans le couloir lorsque Hervé apparaît à sa base.
Je l’appelle, mais le vent empêche toute communication vocale. Et je ne
comprends pas ce qu’il fait : il pose son sac et monte vers moi sans
piolet et vêtu d’un simple pull. Avec le vent qui souffle en rafales
il est vite congelé et doit renoncer. Quel âne !
Je continue donc, franchit des rochers et prend pied sur une pente très
raide. Il n’est plus question de se vautrer maintenant. Et redescendre ?
Tant pis, on verra bien. Je monte, je monte. J’hésite parfois, fais
quelque marches au piolet ou à coups de pieds. Ah que le piolet est bon
ami ! [et pourtant nous sommes loin des piochons griffus et recourbés
modernes !]. Un ressaut raide, encore un, le couloir se courbe vers
la gauche et laisse entrevoir la Fourche à portée de main. Alors,
courant presque, fou de joie, je bondis vers la brèche où sitôt arrivé
je me mets à sauter de joie. Victoire bien modeste mais combien payante. Et seul.
A l’Ouest, là-bas et loin dessous, Bious-Artigues et Bious-Dessus avec
ses petits pins et sa neige bleutée. Au-dessus, les lacs d’Ayous, gelés.
Au loin Ansabère éclairée par le soleil et se découpant sur un ciel bleu.
Au-dessus de moi, au Nord et au Sud, les Grand et Petit Pics, comme à
portée de main. Dieu, qu’Hervé n’arrive donc pas ! Nous l’aurions notre
Ossau en hiver, il serait à nous aujourd’hui. Mais il ne vient pas et
seul le vent siffle dans la brèche maintenant ensoleillée. En face,
presqu’à mon niveau le Piton de la Fourche me regarde et me laisse
rêveur. Tiens, le revoilà ! A qu
and ? A quand ce versant Nord ? Il doit y faire froid aujourd’hui.
La neige de ce versant, une poudreuse légère et fluide comme de l’eau, en témoigne.

Que ce Petit Pic me tente. Pourtant déjà gravi par Hervé et moi en
conditions hivernales le 27 Mars 1961. Mais tout seul, sans corde et
avec aux pieds de mauvaises chaussures, c’est imprudent. Et j’abandonne l’idée.
La descente du couloir est aisée et je cramponne face au vide, preque
assis sur la pente, appuyé sur la pointe du piolet. Les rochers sont
facilement franchis et je retrouve Hervé. Que tout cela est bel et bon.
Pour moi, du moins.
Au loin, point minuscule cahotant sur la neige, Leire qui cingle vers
le refuge… qu’il n’aurait pas dû quitter. Des cris affreux, poussés
par Hervé et moi, accompagnent cette petite chose dont nous ne sommes
même pas sûrs qu’elle nous entende. Nous avons tôt fait de retrouver
nos skis et de filer joyeusement sur les traces de Leire. Afin d’accélérer
la descente je tente un shuss direct assez haut dans la Raillère.
Vitesse terrible, bosses, trous et un vol magistral qui fait sauter ma
fixation de sécurité. Je croyais gagner du temps, heureusement pas
de bobo. C’est déjà ça !

Un dernier casse-croûte dans le refuge et trois quarts d’heure plus
tard nous sommes au col de Pombie ; balayée par le vent la poudreuse
tournoie dans les airs en faisant étinceler ses millions de cristaux
de glace au soleil. Nous descendons vers Aneu en effectuant d’immenses
traversées sur d’innombrables variétés de neige. Arrivés à la voiture
nous nous pensons tirés d’affaire et pour fêter l’événement nous
sirotons une bonne bière tout en guidant Leire qui a pris le volant
et se bat sur une route encombrée des congères de neige accumulées par le vent.
La nuit tombe, une fois de plus, et plus nous avançons plus il faut
dégager la route et ses tas de neige mètre par mètre. Nous avons
l’impression que nous ne nous en sortirons jamais. Des heures
de travail, à la frontale. Finalement, énervé, Leire lance sa tire
à fond la caisse, manque nous écraser et franchit les derniers
obstacles avant une route relativement dégagée. Ouh la la ! Une DS volante !
Maintenant installé dans la voiture nous pensons nous laisser porter
douillettement jusqu’à la vallée. Mais what ? Que font ces deux
voitures arrêtées au bord de la route ? La raison en est vite trouvée :
la route est barrée par une avalanche ! Une énorme avalanche ! Désastre.
Leire, toujours optimiste, voit déjà sa voiture bloquée ici pour l’hiver.
Comme le lieu est désert nous pensons que les gens sont descendus
à Gabas. Leire veut en faire autant. Tranquille, lui. Il vient de se
prélasser durant des heures dans sa luxueuse voiture climatisée et ne
veut pas réaliser qu’après une rude journée Hervé et moi avons trimé
comme des forçats pour dégager la route. Nous sommes fatigués et ne
bougerons pas d’ici. Après force palabres il est décidé que nous dormirons
dans la voiture et attendrons que la route soit dégagée. Les occupants
des deux voitu
res vont certainement entreprendre quelque chose, pensons-nous. Installés
un peu n’importe comment dans l’habitacle nous arrivons tout de même à
dormir et la nuit passe vite.
Le petit jour révèle un monde blanc et silencieux recouvert de poudreuse
légère. Le vent qui a soufflé fort durant la nuit, à secouer la
Et Leire de reprendre sa lithanie : il faut descendre à Gabas,
il faut sauver le soldat DS (propriété de ses parents). Au moment où
nous allions céder, Hervé et moi, les propriétaires des voitures
arrivent avec du renfort : une pelle mécanique et pas mal d’hommes
munis de pelles. Une profonde tranchée est ouverte dans l’avalanche
en 1h1/2 et la DS peut enfin s’en aller en passant entre des murs de
neige de deux mètres de haut
. C’est la fin de notre aventure.
La route est maintenant bien dégagée. Les plaques de neige et de
glace que nous avions recontrées à la montée ont fondu grâce au
puissant vent du Sud qui a réchauffé l’atmosphère. Les stalagtites
de Fabrèges ont disparu.
Arrêt à Gabas pour nous enfiler un succulent et attendu petit déjeuner.
Nous ne nous éternisons pas. Après les gorges du Hourat et le tunnel
nous émergeons dans un nouveau monde à l’antithèse de celui que nous
venons de quitter. Soleil généreux, chaleur, tout concourt à nous
désorienter. D’où venons-nous ?
Toujours près de ses sous et profitant de ce que nous passons à Arudy,
le père Leire veut aller récupérer une scie oubliée lors de la dernière
séance de défrichage. En aurait-il assez de défricher ? Pendant ce temps
j’amène Hervé voir le fameux « dolmen » dans le bois de la ferme d’Anglas.
Je tombe à pieds joints dessus, comment expliquer l’échec cuisant avec
François ? Nous souffrons presque de la chaleur ; sacré vent du Sud !
Dans l’après-midi j’ai le temps de faire un saut au Foufouland avec Hervé.
Nous passons un moment avec Mme Fougère et ses filles (lesquelles,
ce n’est pas précisé).
Je suis invité chez Hervé pour dîner le soir à Mamaïta. Riches heures.
rrière-plan l'arête de Peyreget. Hervé Butel et JP. Leire arrivent.


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