Samedi 20 Octobre 1962 – Gourette, Sarrière et Penemedaa.
Equipe : Hervé, Jean
Véhicule : Super-Néocide
Photo : Hervé sur l'arête Sud du Sarières et fait de l'équilibre
Hervé avait souhaité faire quelque chose à Gourette. De mon côté un projet
me trotte dans la tête. Je ne sais pas si ma forme me permettra de le
réaliser. Nous verrons.
Dès 9h du matin la Super nous dépose à Gourette. Le temps est radieux
et une activité fébrile règne à Gourette. Nous commençons par le
Pene Sarrières, atteint assez rapidement en dépit d’un rythme de
marche très détendu. Là-haut nous cassons généreusement et allègrement
la croûte. Nice et ses contingences sont bien loin, oubliés, enfouis
dans l’inconscient. Jouissons sans vergogne de l’instant présent
que rien ne peut remplacer.
L’arête Sud du Sarrières est presque une formalité, mais une formalité
sensationnelle malgré son rocher parfois un peu douteux. La partie
finale est un tord-boyaux eu égard aux 200 m d’abîme qui plongent
de par et d’autre d’une fine « taillante », mais sans difficulté.
Hervé trouve le moyen de la parcourir debout comme une simple bordure
de trottoir. Une photo l’immortalise.
Nous avons été rapide, nous pouvons faire autre chose. Au Penemedaa
maintenant. Sa face Est nous tend la main. Nous visons le couloir central.
Nous avançons vite et notre progression se mesure à l’aspect de l’arête
Sud du Sarrières qui diminue à notre vue jusqu’à devenir minuscule.
De leur côté les parois du Penemedaa, plongées dans une ombre sévère
prennent de l’ampleur et semblent bardées de défenses redoutables,
mais rien qui ne nous fasse peur.
Il faut remonter un petit névé de quasi-glace pour atteindre la paroi.
L’escalade débute par quelques dalles faciles puis une fissure butant
sur un bec de rocher. J’enchaîne en tête par une traversée à droite,
très aérienne sans être trop difficile, et une zone herbeuse facile
mais assez délicate sur la rive droite du couloir. Hervé prend ensuite
la tête pour descendre de quelques mètres délicats dans le couloir et
le remonte. Nous sortons du couloir deux longueurs plus haut, sans
difficultés notables. Son escalade est curieuse et assez amusante.
Le couloir a débouché sur une longue zone facile en bon rocher, que nous
remontons les anneaux à la main. C’est très détendant. De grandes
dalles suivent. En une ou deux longueurs un peu délicates nous retrouvons
un terrain facile qui nous conduit au sommet central du Penemedaa.
L’occasion d’une pause bien méritée pour dévorer ce qu’il nous reste
de provisions, et celle aussi d’admirer le paysage. La plaine est
recouverte par une immense mer de nuages, laquelle tend à envahir Gourette
et son Soum de Grum, le sommet de la brume, comme presque tous les après-midi.
A l’extrêmité de l’arête Sud un long rappel [celui où s’est tué Bunny en
2006] nous dépose au pied de l’arête. Et c’est l’infâme descente de 1200
m vers Gourette au grand dam des pieds et des jambes (atrocement mal ai-je
écrit). Mais c’est beau. La face W du Penemedaa, vaincue il y a déjà plus
d’un an, prend un aspect terrifiant et magnifique. Ger et Amoulat, désormais
dans l’ombre, ont pris des teintes ocres splendides. Puis c’est le coton
jusqu’à Gourette. Une bonne bière consacre cette belle journée qui s’est
passée dans la joie.
La Super déploie alors ses ailes de fabuleux coursier et nous dépose au
Foufouland à 17h30. A se demander si nous n’avons pas sauté plusieurs
fuseaux horaires. Les adorables sont tous là…