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1945 R. Ollivier

1945 : montée au Plateau du Pailla. Récit de l'accident d'escalade de Thiard

Gavarnie

Photo : JM (3ans 1/2), le berger du Pailla avec son petit labrit et la petite bergère


Août 1945
Robert, Chatou (3 ans et 10 mois) – Balade au plateau du Pailha à Gavarnie.

Seul avec mon père je suis monté au plateau du Pailha, au-dessus de Gavarnie.
Je n’ai pas encore quatre ans et ça ne ressemble pas à une sortie familiale,
Christine (1 an ½) étant restée avec sa mère au Chalet du Vignemale, proche
du village de Gavarnie. Connaissant le père je me demande quel a été le vrai
motif de cette balade. Tester ma résistance (650 m de dénivelé) pour voir
si je suis le digne fils de son père ? ça lui ressemblerait assez. Soulager
le temps d’une balade son épouse qui a fort à faire avec les deux petits
diables Christine et Chatou ? Peu probable. Passer quelques instants avec
son fils afin de mieux le connaître. C’est possible. Monter au Pailha dans
un but documentaire ? Il joint souvent l’utile à l’agréable, alors oui, possible aussi.
Très paternel pour une fois, il a quand même pris soin de me photographier,
seul puis en compagnie du vieux berger devant sa cabane avec sa petite fille
et son sympathique petit chien labrit.
Cette balade ne m’a pas laissé le souvenir d’un effort particulièrement
pénible. Le spectacle du cirque de Gavarnie ne m’a pas impressionné. J’ai
trouvé curieux que mon père semble connaître le vieux berger. Mais un père
connaît tout le monde sans doute. Le retour m’a paru léger, léger…

Accident de Thiard au rocher d’escalade de Gavarnie

Mam prenait le temps de nous promener, Christine et moi, dans
les environs du village de Gavarnie, riches de nombreux endroits
à visiter. ¨Parmi ceux-ci un affleurement rocheux qui servait de
terrain d’entraînement à l’escalade des stagiaires de l’organisation
Jeunesse et Montagne et dont mon père était le chef. Me montrer des
grimpeurs en activité pourrait être bénéfique pour mon éducation,
selon le chef.
En cet après-midi de l’été 1945, il régnait une grande activité sur
le rocher de Gavarnie lorsque nous vînmes admirer les exploits des
hardis montagnards. Ils étaient accrochés sur toute la largeur du
rocher. Certains grimpaient, d’autres faisaient des « rappels »,
quelques-uns s’essayaient à grimper seuls en tête depuis la base
du rocher, une corde accrochée à la taille et l’air martial à souhait
de ceux qui vont affronter la mort avec courage.
Tout cela m’impressionnait bigrement. Quelle idée de s’exposer ainsi,
à une pareille hauteur ! A la question de savoir si cette activité
m’intéressait, j’ai toujours opposé, en ce temps-là, un non catégorique
assorti d’un argument imparable : « Moi, tomber figure ! ». J’avais
déjà appris à ne pas utiliser de gros mots, gueule en était un selon
moi et il n’était pas question que je me « casse la gueule » !
Moi, petit enfant, tomber figure oui, mais pas le hardi, agile et
téméraire adulte qui attaque sous mes yeux la paroi verticale et
s’élève rapidement. C’est une grande personne, elle sait ce qu’il
faut faire pour ne pas « tomber figure ». Me voilà tranquille. Mais
quelle n’est pas ma stupéfaction de la voir lâcher prise, tomber comme
une pierre et s’écraser sur le sol, juste devant moi, en hurlant un
prénom féminin. Sa mère, sa copine ? En tout cas il est toujours vivant,
mais me voilà conforté dans mes craintes qui n’étaient pas de pure
imagination et qui avaient été confirmées de la plus dure des façons !
Il faudra longtemps pour que j’accepte d’escalader un rocher vertigineux.
Dans l’immédiat le spectacle du grimpeur malheureux affublé d’un énorme
plâtre à la jambe et clopinant comme il pouvait dans les rues du village
avec des béquilles renforçait ma détermination de ne pas pratiquer une
activité aussi dangereuse. Ce stagiaire se nommait Thiard – à l’époque
on n’utilisait pas les prénoms. J’ai appris plus tard que son prénom était
Gaston ; j’en garde le souvenir d’une personne souriante et affable.
Mais côté éducation c’était raté pour moi !


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