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Jean M. Ollivier | all galleries >> Climbing in Sixties >> 1961 > MAHAUT - Ode à Mahaut.
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1961 Marie Fougère (d'après photo)

MAHAUT - Ode à Mahaut.

Au bon plaisir de Mahaut

Après des années passées sur nos vélos (sans dérailleurs,
sans freins et sans lumière !) pour gagner nos terrains
de jeu favoris, nous avons pu enfin bénéficier des
services de Mahaut fier destrier à moteur, auquel
nous avons dédié les strophes suivantes qui racontent son histoire :

Ode à Mahaut

Plus vite que l'obus sur son orbe de feu
Mahaut jaillit de Pau, coursier fabuleux,
Miaulant par tous ses pores, secouant les maisons,
Elle fige le bourgeois dans ses plumes d'oisons.
Et, le souffle bloqué, la carcasse tremblante,
Il est alors la proie d'une peur délirante.

C'est ainsi qu'il connaît l'angoisse animale
Causée par les grands monstres aux tribus ancestrales.
Sautant à moitié nu de son lit entr'ouvert
Il y rampe dessous, le nez dans la poussière.
Et il finit la nuit, hocquetant de frayeur
L'œil hagard, le cœur fou, mort de froid et de peur.

Pénétrant dans la nuit comme un rayon de Lune
Nous forçons les espaces et disséquons la brume.
A cheval sur Mahaut nous jouons les éclairs
Et le fier destrier nous énivre de l'air
De la grande conquête toujours renouvelée
Des belles aventures sur son vieux dos pelé.

Le fauve se cabre sous l'accélération
Et il réclame alors toute notre attention.
La Mahaut se saoule en être primitif
De puissant carburant hautement explosif.
Elle frémit d'énergie et se lance au galop
Sur la route connue de la vallée d'Ossau.

Elle transperce les bourgs et coupe les virages,
Glapissant de fureur elle dispense sa rage
Aux pays alentours, et, rasant les passants,
Elle leur roussit le cuir de son souffle brûlant.
Piaffante et rugissante, cratère d'étincelles,
Elle lance un hurlement qui n'a rien de charnel.

Et lorsque l'habitant capte les grondements
Du terrible coursier lançant son hurlement
Dans l'instant qui suivra il ne pourra rien voir
Qu'une traînée de feu déchirant un fond noir
Crachée par les entrailles d'un météore affreux
Traversant l'aube pâle d'un beau matin brumeux.

Et c'est peut-être ainsi qu'à notre pauvre Jules
Ses oreilles étonnées et ses yeux incrédules
Lui auront fait entendre et lui auront montré
Malgré l'affolement de ses sens démontés,
Le terrifiant engin de l'homme de demain,
Narguant le villageois, l'écrasant de dédain.

Mais Mahaut, comme toute mécanique, pouvait
parfois être malade et tomber en panne.
Comme le jour où l'une des soupapes se
décrocha et perça le piston.

On peut raconter l'affaire à la manière de...

Voici venir les temps où, vibrant sur leurs tiges,
Les soupapes s'agitent au fond d'un antre noir.
Les cris et les odeurs empestent l'air du soir.
Valse très diabolique et dangereux vertige.

Les soupapes s'agitent au fond d'un antre noir.
Le moteur arrête enfin sa marche maladive,
Valse très diabolique et dangereux vertige,
Et le piston se creuse en un bel entonnoir.

Le moteur arrête enfin sa marche maladive,
Une marche achevée au néant vaste et noir.
Et le piston se creuse en un bel entonnoir.
La Mahaut a stoppé et son huile se fige.

Une marche achevée au néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige.
La Mahaut a stoppé et son huile se fige,
Ton souvenir en moi n'est plus qu'un pot-au-noir !

Remise en état, elle ne tarde pas à déclarer forfait

Oncques ne vit jamais tel travail de romain

Adonc à l'horizon, émergeant d'un chemin,
Véritable chaos menant chez les Fou-Fou –
Mais antique grand route des elfes de Rapatout –
Quelle est donc cette bête à deux roues, quatre pattes ?
Son allure est comique et sa démarche épate
Quelques guides* égarées, isolées de la plaine.
Ahanant et poussive, c'est Mahaut qui se traîne
Tel un cloporte blessé escaladant un mur.
Elle fait ses derniers pas, les plus laids, les plus durs,
Hocquetant tristement, toussant et crachotant
Elle avance ou recule, s'arrête tout le temps.
Maintenant c'en est trop, elle se bat par la ruse,
Malmenée par les hommes, elle proteste et refuse
D'amener plus avant celui qui la torture
Et risque pour finir d'en faire la pâture
D'un vilain ferrailleur, à deux francs le kilo !

Ô la vilaine fin de la belle Mahaut

Gloire à toi ô Mahaut, animal bien aimé,
Repose ton grand corps tu l'as bien mérité,
Fais panser tes blessures après le grand combat
Moque-toi des humains qui ont le cœur si bas,
Dors en paix maintenant et attends le moment
Qui est enfin venu de ton embaumement.

JMO - 1961


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