Ahh oui...écrire.
Je ne t'ai jamais vu écrire maman, ni lire non plus d'ailleurs.
Sauf ces "romans photos" venus d'europe, j'ai un souvenir vague
de "Intimité" et de "Nous deux" que tu me faisais acheter religieusement
à chaque semaine chez Michel, le dépanneur du quartier.
Au lendemain de la guerre, les populations appauvries
et en butte à des restrictions dans la vie quotidienne rêvent à une autre réalité.
Ce fut ton cas maman et je ne suis pas certaine de ne pas être affligée
à un certain degré de ce même mal ou est-ce bien?
De toutes façons, je ne feuillette pas ces romans et pour les images
disons que c'est moi qui fait clic...
Je me souviens encore du papier et du bruit de ces grandes pages
que tu tournaient doucement, aux images en noir et blanc.
Tu étais alors dans un autre monde, le temps de quelques images...
Tu étais toujours belle maman, j'aimais quand on se parlait sans dire un mot.
Alors...il n'y avait que nous deux pour comprendre, dans ces rares moments.
Ce que je voyais, déjà à l'époque et qui me fascinait, de ces magazines,
c'était la beauté des nuances de gris, entre le noir et le blanc.
J'étais déjà en amour avec la photographie et comme j'admirais tous ces gens
que je ne connaissais pas, des visages à la beauté évidente, de ton calibre.
Souvenir indélibile à l'encre de l'enfance.
C'est tellement triste de ne pas lire ni écrire.
Peut-être que tu n'as jamais su ce que tu as manqué?
Je ne saurai jamais et ça n'aurait servi à rien.
Plus jeune, tu ressemblais à Romy
Mais aux yeux bruns foncés.
Et les photos de toi...
Ce sont mes deux soeurs
qui se sont appropriées et emparées de tout.
Je ne sais pas de quels pouvoirs elles
se croient affublées par la possession jalouse
de tes photos mais tu es dans ma tête maman
et ça ne change ultimement rien.
Tu vis dans mon coeur.
Un jour...j'ai vu un film
J'étais toute petite et dans le film, une jeune fille frêle
tenait encore à la vie du bout de sa fièvre
presque mortelle.
Tout ce qu'elle voyait par la fenêtre
était un arbre et ses feuilles.
Un jour, l'automne arriva.
La petite fille tenait à la vie
par un bout de ficelle...
Elle s'accrocha à la vie
jusqu'à ce que la dernière feuille tombe
et ensuite, elle ne se battrait plus...
Le vieil artiste du village eu vent
de ce qui reliait à la vie la fillette.
Ce soir-là, sous la tempête, la pluie glaciale
et le vent, il se dit que toutes les feuilles de l'arbre
allaient bien disparaître. Malgré le mauvais temps,
il décida de faire un geste qui allait lui coter la vie
à son tour...^
Il peignit, sur le mur derrière l'arbre, une branche éternelle
avec une feuille éternelle...
La petite fille n'y vit que du feu.
Puis le temps redevint doux pour elle.
Elle guérit...grâce à cette feuille immortelle.
Le vieux monsieur lui...était décédé. Le mauvais
temps aura eu raison de lui mais sa signature
devint éternelle elle aussi...
Cette histoire m'a bien marquée jeune
et elle me touche encore aujourd'hui...
J'aurais dû te raconter ce film à nouveau...maman.
À perte de vue les pissenlits aux fourmis!
Riiiiiiiiiiire, comme ils étaient beaux ces bouquets.
C'est à nous que tu le faisais le cadeau maman en nous disant
combien il était magnifique...le bouquet tout jaune!
Et c'était la routine au printemps...ehm, doux souvenir.
C'est ta nouvelle adresse maman...
Une fleur
parmi tant d'autres
d'un lieu aux milliers de souvenirs
qui a bercé mon enfance: le jardin botanique de Montréal.
Matin de brouillard...
Je suis fascinée par ces matins brumeux.
J'implore le soleil de prendre son temps...
6 septembre...
Heureux anniversaire maman...
Maman...je pense à toi.
Je sais combien tu aimais les balades sur le lac...
Tu es prisonnière de ton corps et de tes peurs depuis si longtemps
Je t'imagine libre
Quand tu glissais sur l'eau, rêveuse de l'horizon
Je me souviens du bruit que font les rames contre le bois de l'embarcation
Tes mouvements gracieux à chacun de tes coups de pagaie
comme je te trouvais belle
avec tes allures de Romy Schneider
J'étais petite, le fond noir de l'eau m'effrayait
autant qu'il me fascinait
j'agrippais le rebord du bateau
mes yeux reflétaient le chatoiement des flots
Pour me rassurer
je laissais le soleil me caresser le visage
assise au fond de cette barque
mon corps au creux de tes douces jambes
dont je sentais la peau
parce que quelques boutons
de ta longue robe soleil
étaient détachés
Jeter par-dessus bord l'eau qui se réchauffait
devenait un jeu
que machinalement je faisais
J'avais peur
mais pas autant que j'étais émerveillée
de flotter sur l'eau
seule
avec ma mère.
Je t'aime.
Autant que tu étais belle
Autant que tu avais le goût de l'eau
Je t'aurais tellement voulu
libre
maman...
* *
Ce texte était si naturel à écrire.
Je n'ai eu qu'à fermer les yeux
quand j'ai fait la photo de cette barque
et voilà, les mots s'enchaînaient au souvenir des émotions.
J'ai encore l'affiche format géant...
* *
Adieu Luciano
Luciano Pavarotti, Cavaliere di Gran Croce OMRI
12 Ottobre 1935 – 6 Settembre 2007 -- 71 anni
Sur le pont....
Mais pas d'Avignon, hélas...
J'aurais aimé que tu voyages aussi maman.
C'est juste un petit pont, tout près de chez-moi,
dans une ville que je n'aime pas.
J'aime cependant m'y arrêter parfois, à ce petit pont
mais ça...tu ne l'auras jamais su, comme tellement de choses
et encore moins...vu, parce que tu regardais la vie sans la voir.
Un souvenir de grand-maman
Ce lit de fer, cette délicate dentelle font partie
des moments doux qui ont bercé mon enfance, les dimanches après-midi.
Même si c'était interdit, j'adorais me retrouver à plat ventre
sur la couverture "de chenilles" vert tendre qui ornait le lit de grand-maman.
J'ai encore cette douceur au bout des doigts.
La magie de cette lumière dans la chambre de ta mère, maman, je la laissais
m'envelopper et mon imaginaire dansait au rythme de la brise de la fenêtre
toujours un peu entre-ouverte.
Le temps était bon...
Ta fleur favorite....rouge.
Ce que je retiens des roses
c'est comme tu les aimais,
ignorante hélas de toutes les autres
parce que personne
ne t'en a offert,
tu ne savais pas qu'elles existaient
aussi.
Qu'il y avait tous ces parfums,
toutes ces couleurs
tous ces souvenirs mort-nés.
Mais heureusement...il y a eu les pissenlits et les "petites fleurs de beurre"...
Ô doux souvenir.
Je me souviendrai...
De ces petites choses, de ces petits moments
qui passent souvent sous silence mais qui dans le fond
sont ceux qui parfois laissent la plus jolie poussière d'étoile
dans leur sillon.
Riiiiire, je me souviens du matin, vers 6h00, des requins....dans le lac.
Hihihihiiiiii, j'ai trouvé le moyen de me tremper de la tête au pied
dans 7 pouces d'eau...